Les tuyaux coulent de partout
Depuis sa création, le système québécois de l'éducation en est venu à écarter une notion incontournable en pédagogie: l'étape par étape.
Couper les coins ronds en dessinant un système de production de masse, voilà ce qui s'est produit. On a pensé que la standardisation des apprentissages permettrait d'être plus efficace, plus rapide, plus malléable. Ce processus appliqué au monde scolaire s'est accéléré dans les dernières années pour différentes raisons.
Conséquemment, nous observons aujourd'hui une panoplie d'élèves qui ne suivent plus le rythme de la moyenne (qui n'existe d'ailleurs pratiquement plus). Le rythme singulier de l'élève a tout simplement été écarté de l'équation. Paradoxalement, le système essaie chaque jour de s'ajuster en augmentant les services particuliers aux élèves. En voulant éviter la singularité de chaque élève, le système finit par se faire rattraper. Au lieu d'avouer ses tords et de changer sa mentalité, il préfère colmater les brèches.
Or, c'est toute la tuyauterie qu'il faut changer, et je ne parle pas ici d'une pseudo-réforme de l'éducation ultra-politisée.
Simple remarque: peut-être que si les enseignants passaient moins de temps à évaluer et plus de temps à discuter individuellement avec les élèves, ils n'auraient pas besoin de les évaluer? Mais non, il faut tout évaluer par des examens ou des tests: chaque petit chapitre, et ce pour chaque élève sans exception, dans toutes les matières.
C'est lorsqu'on enseigne en un-à-un qu'on se rend compte à quel point le système est coupé de la réalité des élèves. Pas assez de temps pour les profs déjà débordés, certains diront. Moi je dis que leur temps est très mal organisé!
Et pourtant, il ne faut pas remonter très loin dans l'histoire pour s'apercevoir que l'enseignement un-à-un était la règle générale et non l'exception.
Lorsque je fais du tutorat, combien de fois ai-je la réflexion suivante: « comment peut-on lui donner un tel devoir alors qu'il en est à plusieurs étapes antérieures à cet exercices »? La réponse se trouve dans l'image ci-haut.
C'est le même devoir pour toute la classe, tout comme le même enseignement le lendemain. Cela agit rapidement sur la confiance, puis potentiellement sur l'estime de l'élève. On commence alors à attendre des phrases comme: « je ne suis pas bon en math » ou « je suis pourri en anglais », puis l'élève se met à croire cela.
Les étapes d'apprentissage, c'est personnel à chacun. À tord, on croit souvent qu'un retard est gage de problème. Il faut rester dans le rang et éviter le hors-piste.
Pourtant, sortir des sentiers battus a permis les plus grandes découvertes et généré les plus grandes inventions...
